24/10/2025 ssofidelis.substack.com  13min #294326

Au-dessus des lois

Par  Gordon Dimmack, le 23 octobre 2025

De Savile à Mountbatten, de Blair à Epstein, les secrets de polichinelle que Londres préfère enterrer - et comment nous pouvons riposter.

Comment nomme-t-on une démocratie dont l'élite est au-dessus des lois ?

Comment nomme-t-on un pays dans lequel les riches et les puissants peuvent commettre des crimes odieux et honteux, sans jamais être poursuivis, et où les services de sécurité interviennent pour enterrer les preuves et étouffer la vérité ?

Les Romains appelaient cela "une aristocratie". Les économistes et les historiens pourraient parler d'oligarchie. Certains affirment qu'à l'heure actuelle, dans un monde où des élites non élues tirent les ficelles, il s'agit d'une technocratie. D'autres encore pourraient parler d'apartheid, car le peuple est soumis à une sorte d'occupation.

L'unique certitude, c'est que c'est bien le climat que nous connaissons actuellement.

Savile, ce secret de polichinelle

Les exemples sont nombreux. Le cas de Jimmy Savile [{DJ, présentateur de télévision, philanthrope et pédocriminel britannique]:i] me vient immédiatement à l'esprit. Au sommet de sa gloire, tout le monde savait ses penchants sexuels déviants. Même ma mère savait qu'il était pédophile au début des années 80 - elle le proclamait haut et fort à chaque fois qu'il apparaissait à la télévision. "Regardez comment il attrape cette jeune fille !" disait-elle. "C'est un pédophile, c'est sûr !" - mais il n'a jamais été poursuivi en justice de son vivant. Malgré de multiples allégations et témoignages de victimes, toutes les enquêtes policières ont été discrètement classées sans suite. Son terrible passé n'a été rendu public que plusieurs années après sa mort. Un autre secret de polichinelle enterré jusqu'à ce qu'il soit trop tard.

Blair, le criminel de guerre

Tony Blair, bien sûr, a menti à toute la nation au sujet des armes de destruction massive - un mensonge qui a coûté la vie à un  million d'Irakiens et des milliards de livres sterling. C'est un  criminel de guerre. C'est aussi simple que cela. Mais plutôt que d'en subir les conséquences, il a été soutenu par l'establishment,  nommé chevalier, traité comme un héros par les médias et salué comme un "expert de la paix" dans la région même qu'il a contribué à déstabiliser et à détruire.

Les exemples sont nombreux. Le scénario reste le même. Plus on gravite dans les hautes sphères de la société britannique, plus les pratiques sont dépravées, et moins il y a de risques d'avoir à rendre des comptes. Les plus démunis sont soumis à la loi, tandis que les plus aisés s'en moquent.

Mountbatten, le monstre intouchable

Ce qui m'amène au premier comte de Birmanie, le lord Louis Mountbatten.

Il trônait au sommet de l'aristocratie britannique. Il fut le dernier vice-roi des Indes, le premier lord de la mer, le mentor du prince Charles et le parrain du roi. Il gravitait au cœur de l'establishment, et pourtant, tous ceux qui fréquentaient ces cercles savaient exactement qui il était.

Un monstre.

Le FBI le savait aussi. Leurs dossiers déclassifiés le décrivent comme un homosexuel aux penchants pédophiles pour les jeunes garçons. La baronne Decies, une amie proche de la famille, a déclaré aux agents américains que Mountbatten et son épouse étaient considérés comme des personnes aux mœurs extrêmement légères dans la société. En clair, c'était un secret de polichinelle. Et qu'a fait l'État britannique de cette information ? Rien. Aucune accusation n'a été portée. Aucune enquête n'a été ouverte. Aucune question n'a été posée. Ils ont au contraire confisqué  ses journaux intimes, enterré sa correspondance et tout fait pour  empêcher les historiens de publier ce qu'il reste de ses archives. À ce jour, une grande partie des documents de Mountbatten sont toujours inaccessibles pour des raisons de "sécurité nationale".

Il ne s'agit pas de justice. L'État se protège, ainsi que les siens.

Réfléchissez-y un instant. Si l'on en croit le nombre de preuves et le secret absolu autour de leurs crimes, Mountbatten et sa femme étaient presque certainement des prédateurs. Et si le FBI détient des dossiers, vous pouvez parier votre maison que les services de sécurité britanniques sont également au courant. Pourtant, au lieu d'enquêter, de le dénoncer ou de le poursuivre, les autorités ont choisi de couvrir l'affaire.

Finalement, en 1979, Mountbatten a été rattrapé par le karma sous la forme d'une bombe de l'IRA. Mais même après sa mort, les autorités continuent de dissimuler ses crimes. Et il n'est pas le seul à être protégé.

Epstein, l'opération

Quelques décennies plus tard, le même scénario s'est reproduit avec Jeffrey Epstein. Un autre monstre. Un autre secret de polichinelle. Personne dans la haute société new-yorkaise n'ignorait ce que ces "fêtes" impliquaient réellement. À Londres, tout le monde savait qui il conviait à ses voyages autour du monde.

La presse britannique a commencé à enquêter dans les années 1990, puis au début des années 2000, avec des articles s'interrogeant sur  l'origine de sa fortune, sur la nature de ces "fêtes" débridées et sur ses relations avec les premiers ministres, les milliardaires, les acteurs oscarisés et même les présidents. Ils ne pouvaient pas le prouver, mais ils le flairaient. Encore un secret de polichinelle.

Et si les journalistes avaient des soupçons, le MI5, le MI6, la CIA, le FBI et les services de protection de la famille royale savaient exactement qui était Epstein. C'est évident. Se pose alors la question suivante : pourquoi ces mêmes agences de renseignement ont-elles permis à deux des personnalités publiques les plus en vue de Grande-Bretagne, le prince Andrew et Peter Mandelson, d'entretenir une telle proximité avec lui ? Pourquoi ces rencontres n'ont-elles jamais été signalées ? Pourquoi ces liaisons ont-elles été tolérées, même après la condamnation d'Epstein en 2008 pour délits sexuels ?

Tout le monde a vu la tristement célèbre  photo dans Central Park, ses voyages à  New York et ses dénégations absurdes aux allures de mea culpa.

Concernant  Mandelson, la liste comprend des appels téléphoniques, des rencontres en compagnie d'Epstein, ainsi qu'une  lettre dans laquelle il demande à Epstein de vérifier un contact israélien avec Ehud Barak. Il ne s'agit pas de  simples connivences. Un poids lourd de la politique fait appel à un délinquant sexuel condamné pour obtenir des faveurs.

Et pourtant, les deux hommes ont été protégés. Tous deux ont été mis à l'abri. Tout comme Mountbatten avant eux.

Bien que les preuves qu'Epstein ait jamais été un financier ou un génie de Wall Street gagnant des milliards dans le commerce soient inexistantes, il est indéniable qu'il a été un agent des services secrets - un intermédiaire israélo-occidental menant des opérations de chantage et de pièges sexuels contre l'élite mondiale.

Jeffrey Epstein n'était pas un pervers solitaire propriétaire d'un jet privé. Il était au service d'une opération. Pas besoin d'être un génie pour le comprendre. Le procureur américain Alexander Acosta a rapporté qu'on lui a demandé en 2008 de renoncer à poursuivre Epstein parce qu'" Epstein appartenait aux services du renseignement".

Lorsqu'il a été condamné pour des délits sexuels sur mineurs, il a bénéficié de  conditions avantageuses qu'aucun citoyen lambda n'aurait jamais obtenues : treize mois de "prison" avec un régime de semi-liberté lui permettant de vaquer à ses occupations. Cela n'a rien à voir avec la justice. J'ai connu des hôtels avec des règles plus strictes. C'est un système de mise sous protection.

Selon certaines victimes et des membres du personnel, ses maisons étaient  équipées de  caméras dans chaque pièce, non seulement à des fins de voyeurisme, mais aussi pour  collecter des informations compromettantes, tactique classique pour tendre un piège. Sa compagne, Ghislaine Maxwell, est justement la fille de  Robert Maxwell, soupçonné de longue date d'avoir travaillé pour les services secrets israéliens.

Le carnet d'adresses d'Epstein recelait les coordonnées de tous ceux susceptibles d'être contrôlés : présidents, princes, premiers ministres, milliardaires, scientifiques et célébrités. Et personne ne sait d'où provenait réellement son argent. Il n'était à la tête d'aucun empire commercial officiel, ne laissait aucune trace de transactions d'un milliard de dollars, et disposait simplement d'un puits sans fond de liquidités provenant de sources douteuses, comme Leslie Wexner.

Même lorsque les journalistes ont eu vent de l'histoire d'Epstein, y compris de ses liens avec le prince Andrew,  des années avant que les détails ne soient révélés, l'affaire a été étouffée sous les pressions. Un présentateur d'ABC a plus tard admis à la télévision que la chaîne avait découvert l'affaire des années auparavant, mais qu'elle avait été contrainte de faire machine arrière sous la pression, notamment celle du palais de Buckingham. Un autre secret de polichinelle enterré.

2919 - Remember when ABC refused to air Amy Robach’s "We have everything" story on the Epstein client list?

Et lorsqu'il a finalement été impossible de continuer à protéger Epstein, il a fini par mourir dans une cellule de prison à New York :  les gardiens dormaient,  les caméras étaient commodément éteintes et la surveillance anti-suicide était désactivée. Tout cela ne relève  pas de l'incompétence. Ça s'appelle faire le ménage.

Démocratie ou mascarade ?

Quel enseignement tirer de tout cela ? Et que pouvons-nous y faire ?

De Savile à Blair, de Mountbatten à Andrew et Mandelson, en passant par Epstein, le scénario est immuable. Les élites de la société occidentale peuvent commettre les pires crimes, mentir à leur pays pour le mener vers une guerre coûteuse en milliards et en vies humaines, ou fréquenter des pédophiles condamnés, sans jamais avoir à répondre de leurs actes devant la justice. Les services de sécurité étouffent plutôt tout scandale,  les médias font diversion et l'establishment  les protège.

Ce n'est pas de la démocratie. C'est une mascarade. Le terme "démocratie" vient du grec demos, "le peuple", et kratos, "le pouvoir". Un gouvernement par le peuple, pour le peuple. Tout le monde est égal devant la loi. Les dirigeants sont responsables. Mais en Grande-Bretagne, les faits prouvent le contraire. La loi s'applique aux petites gens. À nous, simples citoyens. Les puissants ne vivent pas sous le joug de la loi, ils vivent au-dessus.

Revenons donc à la question initiale : comment nomme-t-on une démocratie où l'élite est au-dessus des lois ?

Personnellement, je l'appelle le Royaume-Uni.

Je ne vous parle pas de tout ça pour vous déprimer. Mais pour vous faire comprendre l'importance de la riposte. Nous devons tous riposter. Si le terme "démocratie" signifie vraiment "pouvoir du peuple", alors il ne leur appartient pas de faire ou de défaire le système, et c'est à nous de le revendiquer. Soit nous revendiquons la démocratie, soit nous vivons sous le joug d'un système où les puissants restent intouchables et où le reste d'entre nous est censé se taire.

Les scandales peuvent changer de nom - Savile, Blair, Mountbatten, Epstein, Andrew, Mandelson -, mais le scénario ne change pas. Tant que nous ne remplacerons pas ce scénario par le nôtre, rien ni personne ne changera. Voilà pourquoi il est crucial de se battre. Pas demain. Pas plus tard. Maintenant.

Le pouvoir ne cède jamais sans qu'on l'y contraigne. Ça n'est jamais arrivé. Et cela n'arrivera jamais. Les élites ne vont pas se réveiller un matin, soudain pris de remords, et nous rendre notre pouvoir. Elles s'accrocheront à leur immunité aussi longtemps que nous le leur permettrons. C'est pourquoi il nous incombe non seulement de les dénoncer, mais aussi d'exiger mieux, de refuser le silence et de riposter. Si nous n'agissons pas, rien ne changera. Dans le cas contraire, tout peut vraiment changer.

Quand j'aborde ce sujet en famille ou entre amis, leurs réactions sont rarement les mêmes. Certains disent : "Oh, ça me déprime rien que d'y penser. C'est bien trop stressant". D'autres disent : "Que veux-tu y faire ?" Ou encore  : "Qu'on leur coupe la tête !" Il est vrai, si l'on se réfère à l'histoire, que les révolutions violentes ont parfois permis de changer de système. Ils ont raison, mais ce n'est pas l'unique solution.

Il existe cependant une autre solution. Une solution qui demande peu d'efforts, juste un petit sacrifice de la part de chacun d'entre nous pour changer les choses en faveur du plus grand nombre.

Nous devrions ne rien faire. Absolument rien. Pas le moindre geste. Cessons de contribuer à un système qui détruit notre avenir et nous prive des droits et libertés que les générations précédentes ont acquis au prix du sang. Arrêtons d'alimenter ce système corrompu.

N'achetons plus leurs produits. Ne finançons plus les Nestlé, Starbucks et McDonald's de ce monde, des entreprises détenues par les trois mêmes géants :  BlackRock, State Street et Vanguard.

Résilions les abonnements qui financent ceux qui protègent ces monstres : Disney+, Paramount+, Netflix, etc. - et frappons-les là où ça fait le plus mal : au portefeuille. Nous avons déjà été témoins de la façon dont les réseaux cèdent à la pression publique lorsque leurs bénéfices sont touchés. Il suffit de regarder l'affaire Jimmy Kimmel [acteur, humoriste, producteur et animateur de télévision américain, suspendu après ses commentaires sur les réactions à la mort de Charlie Kirk en dénonçant une récupération politique de cette mort par le parti MAGA]. Preuve que nous pouvons changer la donne.

La meilleure façon de nuire aux riches est de les appauvrir. Nous avons tous vu Trading Places Un fauteuil pour deux, comédie américaine de 1983 de John Landis sur les conséquences de la richesse - ou de son absence} - nous avons vu comment ils paniquent et font machine arrière lorsque leurs profits se tarissent. Il suffit d'un petit sacrifice, d'un peu d'abnégation, pour les priver de la seule chose qu'ils vénèrent vraiment : l'argent.

 BDS - Boycott, désinvestissement, sanctions. On comprend pourquoi les politiciens tentent de réprimer ce mouvement. Ce n'est pas pour rien que certains veulent le criminaliser.

Voilà ce qui paraît le plus efficace, en tout cas compte tenu de la situation actuelle du pays. Priver ces criminels et leurs opulents partenaires de richesses. Bien que j'admette volontiers que leur couper la tête permettrait d'accélérer le changement.

Traduit par  Spirit of Free Speech

[ gordondimmack.com]

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